jeudi 31 décembre 2015
Ils érigeaient avec une rapidité surprenante des barricades de blocs de foie gras au torchon.
Ils avaient fiché dans un œil un bouchon de champagne qu'ils retenaient en grimaçant.
Ils s'approchaient les uns des autres dans une alliance inconnue, frottant leurs joues, de droite à gauche. À l'oreille, à l'odeur, évaluaient-ils ainsi la puissance de leurs rôts ?
lundi 28 décembre 2015
Sur le dessus des boîtes aux lettres, surface lointaine sur laquelle échouent missives orphelines et dépliants publicitaires boudés par les fentes, trône ce soir un coffret. Objet, je te soupèse. Une pulsion. Ta densité témoigne que tu enfermes encore ce qui te constitue. Soit trois produits Scorpio Scandalous, une eau de toilette, un gel douche et un déodorant. Cadeau de Noël délaissé, tu as rejoint tes pairs. À mauvais renifleur, salut. Je sais ce qu'il y a dedans, le coffret me le crie. J'ai ce geste qui me trahit, ce réflexe qui dit ma nature. Consumériste. Je réponds à l'appel de la marchandise en la touchant quand bien même celle-ci ne me plaît pas. Ce sent-bon marché, hors-sol, hors contexte, mis dehors, me faut-il le réhabiliter pour que le désir global circule à nouveau, est-ce la raison pour laquelle je le saisis, l'espace d'une seconde, avant de mesurer ma gêne. Piquée par le scorpion. Le venin du commerce.
À mon retour, le paquet n'est plus là.
dimanche 27 décembre 2015
vendredi 18 décembre 2015
Le dernier moi de la née (8)
En ville, les passants pressent le pas, la main lestée.
Ils portent des sacs, et dedans, des paquets insistants aux couleurs d'argent.
Papiers cadeaux, surfaces irisées, offrandes secrètes, jouéclub.
Ils se hâtent quelque part, manège organisé.
Je les suis.
Ils sont tous là.
À bout de bras leurs paquets qui miroitent déposés au pied du monde.
Et je les vois se constituer.
Les tas d'urgence.
mercredi 16 décembre 2015
jeudi 10 décembre 2015
mardi 8 décembre 2015
vendredi 4 décembre 2015
jeudi 3 décembre 2015
mercredi 2 décembre 2015
mardi 1 décembre 2015
vendredi 27 novembre 2015
Ce qui bat
Au cul de la camionnette parisienne qui vient soulager la ville des caprices de ses habitants, parmi les vieux matelas, les gazinières qui ont brulé trop de repas, les meubles d'un passé aux dates incertaines, surgit une vitrine en verre, tête en bas, piétement en faux bois. Une pince à sucre géante apparaît depuis la cage transparente, dans les entrailles de la benne. Travelling latéral sur la fameuse machine attrape. Regarder passer la fête foraine. L'excitation avant l'étreinte. Le jouet qui tend son cou. La main de métal qui hésite, se reprend. Et le cadeau, peut-être. La pince pourrait accueillir parfaitement un cœur. Palpitant dans les encombrants. Je veux voir coûte que coûte aujourd'hui quelque chose qui bat.
jeudi 26 novembre 2015
L'augure
Un rendez-vous d'hiver. La nuit attendue. Le froid décoratif. Comme les chats qui viennent à l'heure dite chercher leur part d'exigence, ils sont là, ils ne manquent jamais ce moment. Ils parlent entre eux devant moi. Alphabet. Territoire. Le ciel, soudain. Je ne sais rien d'eux quand ils n'évoluent pas en volute ici et maintenant. Ils dansent pour moi dans le trou suspendu. Beauté noire et dense, impossible à trafiquer. Je prends le temps. Ils m'apprennent. Ma reconnaissance est sans limite envers le cran des oiseaux.
mardi 24 novembre 2015
mercredi 18 novembre 2015
lundi 16 novembre 2015
mardi 10 novembre 2015
Le pénultième
Allez, encore un mot. Un dernier pour le doute. Avant le silence de la nuit, avant le somme du langage. Une petite liqueur de voyelles ? Ou un grand cru pour mieux tenir le crachoir ? Boire les paroles, boire jusqu'à la ligne, avant le point du jour. Puis les langues satisfaites butent contre le palais. L'ivresse livresque atteinte. Le vertige d'avoir trop lu.
lundi 9 novembre 2015
Tête-à-tête
Une idée qui vient. Première rencontre. Désir de s'aborder. Être tout myéline pour mieux s'attirer. Se retrouver en boîte crânienne. La dure-mère y consent. Nous voilà ensemble. Mise en méninge. Nos cellules excitables, notre matière grisée. Qu'est-ce donc que cette idée quand tout est stimulé ? Un sentiment.
lundi 2 novembre 2015
samedi 31 octobre 2015
mercredi 28 octobre 2015
dimanche 25 octobre 2015
Le plaisir de la grimpe
Elles m'attendent chaque fois, nous nous redécouvrons.
Sur ma paroi aux formes organiques, je me hisse en confiance.
Mon pied sur un foie.
Ma main sur un estomac.
Mon haleine sur un postérieur.
Ma sueur sur une rondeur.
Ma combinaison de lycra rencontre un sexe.
Mon baudrier touche une omoplate.
Arrivée au sommet je ne regarde pas en bas.
Le bonheur en hauteur.
J'aime une salle d'escalade.
mercredi 21 octobre 2015
Fiaca à la FIAC*
* grosse flemme pendant la foire d'art contemporain
Mon drone sous la coupole
caméra embarquée
je quadrille les allées
sans trop me fatiguer
comme les prix je m'envole
mais le bourdon s'emballe
se crashe dans les formes
et les huiles s'affolent
la bête est ceinturée
mon joujou saccagé
épilepsie de l'art.
chanel.
J'ai laissé le hasard
œuvrer.
Je bave en m'endormant.
mardi 20 octobre 2015
jeudi 15 octobre 2015
mardi 13 octobre 2015
jeudi 8 octobre 2015
mardi 6 octobre 2015
Fermer le robinet
Mettre une marinière. Jamais fait ça. Mais l'enfiler pour saluer l'inauguration au Havre du plus gros porte-conteneurs au monde. Jamais vu le Havre. Mais y aller pour ce fleuron français. Jamais été made in france. Jamais navigué. Mais monter à bord pour voir le monument. Jamais saluer un équipage. Accrocher la marinière en montant un escalier suspendu dans l'immensité. Penser à la chemise arrachée du gars d'Air France qui a fait le tour du monde sans passer par la mer, pas comme ce Bougainville qui donne son nom à ce géant. Préférer les bougainvilliers. On dit qu'ils sont liés, mais ils ne poussent pas au Havre qui n'est pas dans une région chaude à ce que je sais. Ne jamais écouter ceux qui parlent de microclimat. Ne pas penser à la COP21. Vouloir repeindre en rose bougainville tout le bateau. Pensez aux actions de Greenpeace. Toute cette flotte autour de moi. Fermer le robinet.
lundi 5 octobre 2015
samedi 3 octobre 2015
jeudi 1 octobre 2015
Octobre bouge
Nouveau mois toujours le dixième alors je m'en vais lui chercher un autre temps, d'autres manières, un visage différent, l'appeler violette ou crustacé, le vivre autrement, le toiletter, le promener loin pour m'épargner les conversations toutes canines dehors, pour éviter de croiser la silhouette novembre et, collée à son train, la fin damnée.
lundi 28 septembre 2015
dimanche 27 septembre 2015
samedi 26 septembre 2015
samedi 19 septembre 2015
jeudi 17 septembre 2015
lundi 14 septembre 2015
On n'ignore pas Simone
"… et pour paraphraser Simone qui fabriquait tout le temps des verbes - amertumer, mythologer, nostalgier - , le petit sketch qui va suivre pourrait s'intituler : comment perplexer un journaliste."
Cette phrase, extraite du documentaire de Chris Marker consacré à Simone Signoret, me joyeuse totalement.
Mémoires pour Simone, Chris Marker, 1986.
(vu sur Arte hier soir)
dimanche 13 septembre 2015
vendredi 11 septembre 2015
mardi 8 septembre 2015
lundi 7 septembre 2015
vendredi 4 septembre 2015
mardi 28 juillet 2015
jeudi 23 juillet 2015
mardi 21 juillet 2015
lundi 20 juillet 2015
mardi 14 juillet 2015
Le chant des sirènes
… et tous furent attirés par un drôle de chant : strident comme une alarme et traduit dans toutes les langues européennes. Et les sirènes portaient toutes un costume sombre, un costume d'homme pour la plupart, sauf une, car il y avait bien un spécimen féminin, et peut-être quelques montures de lunettes en écaille mais pas de cheveux longs.
dimanche 12 juillet 2015
samedi 11 juillet 2015
La scène & l'hémicycle
Ils sont en pleine gesticulation. En pleine tirade, en plein acte, en plein dedans. Ils sont tous à Avignon, mais pas sur le pont du politique. Ils n'iront pas à Bruxelles, le souffleur me l'a dit. Pour une fois qu'il n'y a pas de débâcle intermittente, de grève des représentations, ils ne vont pas lâcher la rampe et ses feux. Show must go on.
Ils doivent pourtant tout à la Grèce, à sa puissance mythologique, antique, tragique, dramaturgique. Des enfants gâtés. Tant Py pour eux.
vendredi 10 juillet 2015
Les jeunes filles mannequins, réquisitionnées chaque début juillet pour la semaine de la Haute Couture parisienne auraient pu s'en tenir là, au dernier défilé du 9 juillet. Mais non, elles louent un bus. Elles montent dedans. Elles indiquent au chauffeur leur destination : direction Bruxelles. Le trajet n'est finalement pas beaucoup plus long qu'un embouteillage rue de Rivoli, à la seule différence que l'engin roule. Pénétrer l'hémicycle du parlement européen, pour elles, c'est comme découvrir un décor que Karl n'aurait pas eu l'audace de faire surgir au Grand Palais. Du vrai réel, aussi abstrait qu'une dette grecque. Elles parcourent les travées sans qu'on leur donne des ordres, elles sourient par défi envers tous les pouvoirs. Elles viennent d'un peu partout, et cet espace traversé par les langues et les nationalités est un peu leur maison. Elles vont rester là. Au moins jusqu'à dimanche. Elles vont faire en sorte que ce foyer ne brûle pas.
jeudi 9 juillet 2015
Le cycle & l'hémicycle
Depuis le Havre, étape du jour, les coureurs du Tour de France ont la ferme intention de ne pas rejoindre la Bretagne, mais de retourner en Belgique, a-t-on appris d'une source proche de la déraison. Direction Bruxelles, en peloton serré. Sur leur chemin, ils trouveront les gourdes et les idiots nécessaires au ravitaillement de la peur. Les coureurs refusent désormais le contre-la-montre. Les coureurs ne veulent plus avoir la tête dans le guidon. Les coureurs rejettent un maillot portant la même couleur que les étoiles de pays désunis. Ils débouleront en sueur dans un dernier sprint, leur effort éclaboussant des dirigeants horrifiés par la vue de mollets apparents et de muscles formés par le labeur. Pas de champagne à l'arrivée.
mercredi 8 juillet 2015
L'arène & l'hémicycle
Les taureaux de Pampelune, traditionnellement lâchés dans les rues, ont décidé de continuer leur route pour rallier les étoiles de Bruxelles. 1177 kilomètres au pas de charge me confirme une source sûre de moi. J'ai le temps de peindre le drapeau européen en rouge pour motiver les bêtes dont l'arrivée est prévue pour dimanche. Les taureaux ne veulent plus piétiner les gens. Les taureaux ne sont pas prêts à mourir. Les taureaux veulent voir la frayeur des dirigeants. Lire sur leurs visages la peur bleue Europe.
dimanche 5 juillet 2015
mercredi 1 juillet 2015
Il faut boire, boire et reboire, et faire des rébus
(ceci n'est pas un message d'alerte en cas de vague de chaleur du Ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes - d'ailleurs le terme chaleur, plutôt que canicule, trop meurtrier, à qui s'adresse-t-il dans ce Ministère aux vocations plurielles et féminines... mais bref, ce n'est pas le débat, jouons plutôt un peu.)
Mon premier est bien brave
Ma seconde est bien aimée
Mon troisième est bien surpris
Mon quatrième n'est pas de l'eau
Mon cinquième est bien droit
Mon sixième est bien là
(preux-mie-hé!-jus-i-y-est)
Et ce rébus qui ne contient pas d'eau ne trouvera pas grâce aux yeux du Ministère...
mardi 30 juin 2015
dimanche 28 juin 2015
vendredi 26 juin 2015
dimanche 21 juin 2015
mercredi 17 juin 2015
Une scène
Un couple marche sur le boulevard, mais la femme opère chaque fois une sorte de décrochage, un pas de côté, comme si l'autre se mettait sciemment sur son chemin et qu'elle voulait à tout prix s'en débarrasser. Exaspération. Quelque chose ne va pas entre eux. Ils portent des sacs, un morceau de leur vie, l'errance, et lui tient en plus une cage en plastique à la porte grillagée, de celles qui contiennent supposément un animal de compagnie. Son pas à elle n'est pas très assuré, elle flotte plutôt, jambes maigres dans un jean étroit, pendant qu'il est à ses trousses, mais pas vraiment, il avance quoi, il fait ce qu'il peut avec son barda, elle s'agace, il la fixe, en orbite. C'est le moment de traverser, et à l'arrêt, c'est de pire en pire, il est trop proche dans l'immobilité, comme aimanté, elle se recule, se décale, il veut lui parler, elle ne veut pas, allume une cigarette pour se créer un espace à elle, dentition, bras, briquet, feu vert, et elle s'élance comme pour en finir avec lui, rage, dépit, mouvement, il balance la cage à bout de bras qui atterrit contre la portière d'un monospace qui circule, c'est son droit. Bruit du choc des deux caisses, celle du chat contre celle de l'homme, les gravillons d'une litière se répandent depuis l'ouverture et arrosent le bitume, les autres piétons sont saisis, le projectile aurait pu les atteindre, à qui était-il destiné, à cette femme soudain bolide qui a déjà rejoint l'autre côté du trottoir, bientôt évaporée pendant que le type ramasse la cage et crie "Je l'aime mais elle comprend pas" alors que les gens veulent surtout savoir s'il y a un animal là-dedans, mais rien, on n'entend pas un son provenant du bloc mystérieux. La voix de l'homme, elle, continue de retentir, propos décousus, les mots hôtel, plainte, les verbes dépouiller, tuer et puis le conducteur sort, et là c'est une autre histoire, une autre haine qui pourrait surgir, il contourne sa voiture, regarde la zone d'impact, étonnamment placide pourtant, ou alors il bouillonne, mais c'est comme si l'image de la petite maison de l'animal comme objet percutant était une chose trop saugrenue et seulement capable d'anesthésier sa colère, et puis pas d'enfoncement à signaler, il remonte à bord, alors que l'amoureux transi et furax est déjà parti à la recherche de son tourment.
Pendant ce temps-là, des élèves planchent sur un des sujets de l'épreuve de philo en série économique et sociale : "La conscience de l'individu n'est-elle que le reflet de la société à laquelle il appartient ?".
lundi 15 juin 2015
jeudi 11 juin 2015
mardi 9 juin 2015
dimanche 7 juin 2015
vendredi 5 juin 2015
À froid
Les mots sont invités à ne pas tous se présenter au portillon labial, à rester dans la glacière au-delà d'un certain degré Celsius. En cas de forte chaleur, les phrases seront réduites à la Trinité sujet-verbe-complément. Ceci pour ne pas empâter la bouche, déjà en surchauffe quand la déshydratation guette. Merci.
lundi 1 juin 2015
dimanche 31 mai 2015
samedi 30 mai 2015
mardi 26 mai 2015
lundi 25 mai 2015
lundi 18 mai 2015
vendredi 15 mai 2015
Mourir de rire
J'ai voulu avaler un clown. Passer le chapeau au mixeur, faire un espuma de perruque, débiter le nez rouge à la mandoline, cuire à l'étouffée le costume en polyester, dresser l'assiette en l'agrémentant de la fleur en plastique. Petite sauce au fard gras. C'est au moment d'avaler les chaussures que les choses se sont gâtées. Pièce montée trop volumineuse. Rien ne passait. Tout sur l'estomac. Jusqu'au trépas.
mercredi 13 mai 2015
mercredi 6 mai 2015
(Quand la vie contemporaine fait écrire n'importe quoi)
Alors que j'étais tranquillement occupée à scanner le code-barres au dos de mon paquet de rouleaux de papier toilette à l'épaisseur conséquente pour vérifier si une grande enseigne afficherait un prix plus attractif que celui que j'avais eu à payer en m'en tenant au rack d'une moyenne surface, et tout ceci à l'aide de mon smartphone qui m'offrait ce service grâce à une application dédiée, le destin frappa soudain à ma porte.
mardi 5 mai 2015
lundi 27 avril 2015
dimanche 26 avril 2015
Conférence de presse
(moments de vie, à la manière du procureur de la République de Paris)
"En décembre 2014, en pleine période des fêtes de Noël passées dans une maison de famille située dans le Périgord Noir et réunissant douze membres âgés de 6 mois à 70 ans, une huître n°3 jugée douteuse a fait l'objet d'une mise à l'écart pour éviter tout embarras post-réveillon. Le 2 janvier, deux individus, identifiés comme un couple depuis juin 2011, ont fait le chemin inverse vers leur domicile avec pour objectif la reprise du travail, et l'on note qu'un arrêt a été effectué à la station service de La Source. Le ticket de caisse confirme l'achat de confiseries, en plus d'un plein d'essence sans plomb. Toujours en janvier, le 20 du mois, l'acquisition d'une citadine 5 portes automatique avec équipement multimédia GPS à écran tactile et une technologie inédite visant à faciliter les créneaux a permis au dit couple d'étendre son parc automobile, pour, je cite "que la prochaine fois, tu te démerdes seule pour aller là-bas, je peux plus supporter les remarques de ton père". En février 2015, alors que la tension au sein de la structure conjugale était retombée et que l'homme et la femme célébraient la Saint-Valentin au restaurant Cru & Stacés, la consommation d'un plateau de fruits de mer leur a été fatale. L'intoxication alimentaire n'a malheureusement pas pu être évitée. Le couple n'a pas survécu."
vendredi 24 avril 2015
mardi 21 avril 2015
Considérations météo
Les lunettes de soleil pour commencer. Et la crème solaire, qui est certainement plus qu'un indice. Tous ces filtres entre soi et le monde ne sont pas là seulement pour nous protéger du soleil. Simplement le beau temps appelle la balade, le pique-nique, le barbecue, le point d'eau. Soudain, après des mois d'isolement, l'extérieur s'impose, et la foule qui va avec, cohorte avide d'UV. Il faut alors pouvoir dissimuler son regard, qui se fixera où il veut plutôt que sur le visage de cet interlocuteur déjà couleur homard aimant faire partager très largement son point de vue sur le monde (où trouver les meilleures merguez dans le coin par exemple). Pour diminuer un peu plus la pression sociale, lever les yeux au ciel sans craindre d'être remarqué est un autre avantage. Le spray protection 30 protégera quant à lui de toute stratégie tactile ; le grain de peau à découvert quand les températures grimpent fonctionnant souvent comme un aimant. Prévenir la caresse d'un vague ami commun que le rosé aura désinhibé en lui signalant qu'il viendra s'échouer sur un corps gras, et le manège ne se reproduira pas. Parions enfin sur la pollution galopante qui rendra peut-être un jour le port du masque obligatoire. Il sera dès lors possible de profiter du ciel tout en neutralisant les paroles a et b ou b.a.-ba, dont la science établira bientôt le potentiel de dangerosité quand l'humain y est trop exposé.
jeudi 16 avril 2015
mardi 14 avril 2015
Des arbres à abattre
J'assiste par hasard au démontage d'un arbre en milieu urbain. Un élagueur perché débite des morceaux du tronc volumineux petit à petit. Un travail minutieux et risqué, des encordages complexes et le bruit de la tronçonneuse. Je ne pense pas plus au désagrément sonore qu'à la raison de cette destruction verte, je regarde surtout le gars qui ne travaille pas seul, qui ne peut même pas faire le tour de ce qu'il s'apprête à mettre à terre, j'observe toute cette logistique et cette maîtrise pour venir à bout d'un machin. Je remercie cette scène de s'être trouvée sur son chemin car elle m'amène à me souvenir du titre d'un texte de Thomas Bernhard : Des arbres à abattre ou le monologue furax d'un observateur de la société artistique viennoise. Le lire au plus vite, alors je presse le pas et quitte l'élagueur et sa sciure de bois.
dimanche 12 avril 2015
Paris km zéro
Il m'a fallu courir plus vite pour échapper aux visions de lycra.
Faire de longues foulées pour ne pas voir les visages empourprés par l'effort asphyxiant.
Filer fissa pour éviter les sueurs éparses, les humeurs volantes.
Augmenter la cadence pour m'éloigner des râles et des hourras.
Mon marathon de feignasse.
samedi 11 avril 2015
Première mondiale
Alors que la réplique magistrale de la grotte ornée dite Chauvet vient d'être inaugurée, je déclare ouvert mon propre petit domaine, révélant tout d'une prouesse génétique au service de l'émotion. En avant-première, voici la partie gauche de mon patrimoine manuel, et son bouquet digital unique. Ma main qui pendouille quand je cours, qui devient moite quand je chasse, qui lève son majeur quand j'affronte. Je souhaite d'ores et déjà la bienvenue à ceux qui désireront me visiter et pourront saisir ainsi l'ampleur des dégâts. Mes organes se succèdent offrant à l'œil une diversité de formes et de matières, allant du plus lisse au plus tourmenté et témoignant de la courte et ennuyeuse histoire de mon humanité. Mon public se trouvera face à un ensemble d'une grande technicité, se montrant parfois de manière un peu (trop?) théâtrale. La visite se terminera sur la grande fresque des lions. Je ne vous dis que ça. Je suis en train de constituer le kit photos et de régler les derniers détails du programme interactif. À bientôt chers curieux.
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