jeudi 31 décembre 2015


Ils érigeaient avec une rapidité surprenante des barricades de blocs de foie gras au torchon.
Ils avaient fiché dans un œil un bouchon de champagne qu'ils retenaient en grimaçant.
Ils s'approchaient les uns des autres dans une alliance inconnue, frottant leurs joues, de droite à gauche. À l'oreille, à l'odeur, évaluaient-ils ainsi la puissance de leurs rôts ? 

lundi 28 décembre 2015


Sur le dessus des boîtes aux lettres, surface lointaine sur laquelle échouent missives orphelines et dépliants publicitaires boudés par les fentes, trône ce soir un coffret. Objet, je te soupèse. Une pulsion. Ta densité témoigne que tu enfermes encore ce qui te constitue. Soit trois produits Scorpio Scandalous, une eau de toilette, un gel douche et un déodorant. Cadeau de Noël délaissé, tu as rejoint tes pairs. À mauvais renifleur, salut. Je sais ce qu'il y a dedans, le coffret me le crie. J'ai ce geste qui me trahit, ce réflexe qui dit ma nature. Consumériste. Je réponds à l'appel de la marchandise en la touchant quand bien même celle-ci ne me plaît pas. Ce sent-bon marché, hors-sol, hors contexte, mis dehors, me faut-il le réhabiliter pour que le désir global circule à nouveau, est-ce la raison pour laquelle je le saisis, l'espace d'une seconde, avant de mesurer ma gêne. Piquée par le scorpion. Le venin du commerce. 
À mon retour, le paquet n'est plus là. 

dimanche 27 décembre 2015


Entre deux eaux
les jours s'écoulent
coquilles d'huîtres 
et heures creuses
volailles farcies
temps de cuisson
les réveils ont
des ruses de bétaïne.

mardi 22 décembre 2015

vendredi 18 décembre 2015


Le dernier moi de la née (8)

En ville, les passants pressent le pas, la main lestée.
Ils portent des sacs, et dedans, des paquets insistants aux couleurs d'argent.
Papiers cadeaux, surfaces irisées, offrandes secrètes, jouéclub.
Ils se hâtent quelque part, manège organisé.
Je les suis. 
Ils sont tous là.
À bout de bras leurs paquets qui miroitent déposés au pied du monde.
Et je les vois se constituer.
Les tas d'urgence. 

mercredi 16 décembre 2015


Le dernier moi de la née (7)

Les fins de mois sont durs
mais cette fois
pas de déprime de Noël.

jeudi 10 décembre 2015


Le dernier moi de la née (6)

Allez
Ce que je veux
Ce qui me plaît
Ce dont je rêve

Alors 
Il faudra bien tout retenir

mardi 8 décembre 2015


Le dernier moi de la née (5)

J'établis une witchlist 
sous le manteau d'un lobe de cerveau 
panel d'acrimonies 
rayonnage d'erreurs 
ADN honnis
pour tout cela, pas de cadeau

lundi 7 décembre 2015


Dans l'urne 
j'ai glissé
mon corps électoral
d'un bleu ecchymose
s'enveloppe.

vendredi 4 décembre 2015


Le dernier moi de la née (4)

Dans les vitrines 
de la buée
on n'y voit rien
les peluches transpirent à grosses gouttes
les ours s'épongent avec les poupées
même les manèges ont des suées 
mais les enfants ne pleurnichent pas
ils sont en âge
ils savent, pour le réchauffement climatique.

jeudi 3 décembre 2015


Le dernier moi de la née (3)

les rues, enluminées de décorations
étoile, je passe
flocon, je ralentis
rennes et traîneau, je m'arrête

mercredi 2 décembre 2015


Le dernier moi de la née (2)

Adulte dresseur de listes
comme chaque année
m'éloignant de l'enfance 
de la phosphorescence
je réclame une seule chose
au seul habilité
du rab de neurones
au Père Nobel. 

mardi 1 décembre 2015


Le dernier moi de la née

te voilà
tes aiguilles
une à une 
sous ma peau
commencent leur travail de sapin

vendredi 27 novembre 2015


Ce qui bat

Au cul de la camionnette parisienne qui vient soulager la ville des caprices de ses habitants, parmi les vieux matelas, les gazinières qui ont brulé trop de repas, les meubles d'un passé aux dates incertaines, surgit une vitrine en verre, tête en bas, piétement en faux bois. Une pince à sucre géante apparaît depuis la cage transparente, dans les entrailles de la benne. Travelling latéral sur la fameuse machine attrape. Regarder passer la fête foraine. L'excitation avant l'étreinte. Le jouet qui tend son cou. La main de métal qui hésite, se reprend. Et le cadeau, peut-être. La pince pourrait accueillir parfaitement un cœur. Palpitant dans les encombrants. Je veux voir coûte que coûte aujourd'hui quelque chose qui bat. 

jeudi 26 novembre 2015


L'augure 

Un rendez-vous d'hiver. La nuit attendue. Le froid décoratif. Comme les chats qui viennent à l'heure dite chercher leur part d'exigence, ils sont là, ils ne manquent jamais ce moment. Ils parlent entre eux devant moi. Alphabet. Territoire. Le ciel, soudain. Je ne sais rien d'eux quand ils n'évoluent pas en volute ici et maintenant. Ils dansent pour moi dans le trou suspendu. Beauté noire et dense, impossible à trafiquer. Je prends le temps. Ils m'apprennent. Ma reconnaissance est sans limite envers le cran des oiseaux. 

mardi 24 novembre 2015


Le nez dehors
mais la jambe qui refuse
la ville part fumée
les bouquets prennent eau
accroupis
nuques et corolles courbées

lundi 23 novembre 2015

mercredi 18 novembre 2015


Les fleurs coupées du monde
dans la ville recueillie
pollinisent les esprits
c'est la vie, la vie qui s'entête.

lundi 16 novembre 2015


Aspirée par la gravité
la liberté des corps qui pensent
le cœur lourd chamade le pavé 
la pesante heure

mardi 10 novembre 2015


Le pénultième 

Allez, encore un mot. Un dernier pour le doute. Avant le silence de la nuit, avant le somme du langage. Une petite liqueur de voyelles ? Ou un grand cru pour mieux tenir le crachoir ? Boire les paroles, boire jusqu'à la ligne, avant le point du jour. Puis les langues satisfaites butent contre le palais. L'ivresse livresque atteinte. Le vertige d'avoir trop lu. 

lundi 9 novembre 2015


Tête-à-tête

Une idée qui vient. Première rencontre. Désir de s'aborder. Être tout myéline pour mieux s'attirer. Se retrouver en boîte crânienne. La dure-mère y consent. Nous voilà ensemble. Mise en méninge. Nos cellules excitables, notre matière grisée. Qu'est-ce donc que cette idée quand tout est stimulé ? Un sentiment. 

lundi 2 novembre 2015


Persona non granit

Mon chrysanthème
floraison tardive
résistant à tout
tombé pour l'inconnu
croire en la fleur d'or
car l'ornement jamais

samedi 31 octobre 2015


information - déformation

On frappe
à la porte
l'éclusier désarçonné
ouvre le robinet

Hélé
en pleine rue
le commissaire-priseur confus
frappe sur le pavé

Un pli
pour vous
le blanchisseur contrit
lui dit de repasser

mercredi 28 octobre 2015


monautomnal

de bon matin
rosée de particules fines
rue campagne première
pare-brise enfeuillés 
prospectus de yoga
un gant égaré 
finit de prendre racine
dans un égout 

dimanche 25 octobre 2015


Le plaisir de la grimpe

Je fréquente un mur de varappe et m'éprends de ses prises.
Elles m'attendent chaque fois, nous nous redécouvrons.
Sur ma paroi aux formes organiques, je me hisse en confiance.
Mon pied sur un foie. 
Ma main sur un estomac.
Mon haleine sur un postérieur. 
Ma sueur sur une rondeur. 
Ma combinaison de lycra rencontre un sexe.
Mon baudrier touche une omoplate.
Arrivée au sommet je ne regarde pas en bas.
Le bonheur en hauteur. 
J'aime une salle d'escalade. 

mercredi 21 octobre 2015


Fiaca à la FIAC*
* grosse flemme pendant la foire d'art contemporain

Mon drone sous la coupole
caméra embarquée
je quadrille les allées 
sans trop me fatiguer
comme les prix je m'envole
mais le bourdon s'emballe
se crashe dans les formes
et les huiles s'affolent
la bête est ceinturée
mon joujou saccagé
épilepsie de l'art.

Un stand est mis à sac
chanel.
J'ai laissé le hasard
œuvrer.

Je bave en m'endormant. 

mardi 20 octobre 2015


histoires 
le sol mou d'une rencontre
des oiseaux non-voyants 
les peaux que chacun laisse
la pudeur et la lèchefrite
le travail d'une mouche
le train de vie d'un sandwich
la migraine dans un bol
la cigarette amoureuse d'un pou
les vertèbres syndicalisées
le lac en analyse
sans queue ni tête

jeudi 15 octobre 2015


couette depardieu
bonnet farrow
gants clémenti
cheminée chabrol
froid cassavetes 
gris hitchcock
manteau welles
laine duras

mardi 13 octobre 2015


tour du globe 
mon œil 
hémisphère myope

je monde 
tu pays
nous nous terrons

incontinent
en sale état
est l'ici-bas

jeudi 8 octobre 2015


Le temps s'écroule.
Dans le sens des anguilles d'une montre.

Comme voulez-vous alors. 
Qu'il ne m'échappe pas.


mardi 6 octobre 2015


Fermer le robinet

Mettre une marinière. Jamais fait ça. Mais l'enfiler pour saluer l'inauguration au Havre du plus gros porte-conteneurs au monde. Jamais vu le Havre. Mais y aller pour ce fleuron français. Jamais été made in france. Jamais navigué. Mais monter à bord pour voir le monument. Jamais saluer un équipage. Accrocher la marinière en montant un escalier suspendu dans l'immensité. Penser à la chemise arrachée du gars d'Air France qui a fait le tour du monde sans passer par la mer, pas comme ce Bougainville qui donne son nom à ce géant. Préférer les bougainvilliers. On dit qu'ils sont liés, mais ils ne poussent pas au Havre qui n'est pas dans une région chaude à ce que je sais. Ne jamais écouter ceux qui parlent de microclimat. Ne pas penser à la COP21. Vouloir repeindre en rose bougainville tout le bateau. Pensez aux actions de Greenpeace. Toute cette flotte autour de moi. Fermer le robinet.

lundi 5 octobre 2015


les pages de mon livre 
sont en papier de verre
l'écran de mon mobile
est en mille morceaux
et mes doigts rouge sang

samedi 3 octobre 2015


Geste inconnu au bataillon
Rire non répertorié
Organe jamais rencontré
Pas sur la liste désolé
Votre calocipé 
Sur une vieille planche d'illustrations
Nous chercherons 
Mais dépêchons
Notre consigne
pour le moment
et d'ignorer 
ce qui surprend.

jeudi 1 octobre 2015


Octobre bouge

Nouveau mois toujours le dixième alors je m'en vais lui chercher un autre temps, d'autres manières, un visage différent, l'appeler violette ou crustacé, le vivre autrement, le toiletter, le promener loin pour m'épargner les conversations toutes canines dehors, pour éviter de croiser la silhouette novembre et, collée à son train, la fin damnée. 

lundi 28 septembre 2015


Prédiction lunaire

Cette nuit, l'incendiaire, la sanguinaire, la folle, la goulue m'a laissée dormir en paix. Demain, la petite teigneuse, dure comme un ongle, albumine sale, contours aux forceps, œil dans le bouillon du ciel, haleine de revanche, va éreinter ma tempe. 

dimanche 27 septembre 2015


Ode au dahlia

tige douteuse
boutons méduse
parfum d'asperge 
trafic de couleurs 
quelque chose noir
t'offrir n'existe pas
on s'arrange
je te garde pour moi

samedi 26 septembre 2015


Automne !
mais les arbres têtus
les feuilles convaincues
encore un peu
avoir été et faire durer
ne rien voir devenu

samedi 19 septembre 2015


Et l'eau 
sur l'homme lent
rien ne presse 
les années
ont déjà ruisselé
la goutte contre l'averse
depuis longtemps
l'a emporté

jeudi 17 septembre 2015


No sweet home

le mystère s'épaissit 
la mayonnaise écœure
et l'agent de liaison 
a maigri
table et négociations
l'artillerie de sortie
mais pas la nappe à fleurs
et les hôtes rechignent 
couteaux entre les dents
trahis par leurs caries.

lundi 14 septembre 2015


On n'ignore pas Simone

"… et pour paraphraser Simone qui fabriquait tout le temps des verbes - amertumer, mythologer, nostalgier - , le petit sketch qui va suivre pourrait s'intituler : comment perplexer un journaliste."
Cette phrase, extraite du documentaire de Chris Marker consacré à Simone Signoret, me joyeuse totalement. 

Mémoires pour Simone, Chris Marker, 1986.
(vu sur Arte hier soir)

dimanche 13 septembre 2015


Comme l'escalator 
mis en branle
en ma seule présence
la porte automatique 
pleine de déférence
Et le distributeur 
à me faire des avances
J'attends de la machine humaine
mieux qu'une indifférence.

mardi 8 septembre 2015


moutarde plein les yeux
steaks hachés dans les jambes
larmes aux bord des ongles
nez qui salive 
veines au beurre noir
glotte dans les chaussettes

vos hormones, madame.

lundi 7 septembre 2015


Je marche sur des eux
Et c'est ainsi que naît
la calvitie des hommes
prudence et pas comptés
sur la pointe des pieds
leur cuir échevelé
se rend sous la friction
et vient la sensation 
de l'œuf encoquillé

vendredi 4 septembre 2015


La mer n'oublie pas

Alors que ma mémoire
un marais salant
et dedans
une chose ou deux ou trois
le gros évaporé
le reste 
des milligrammes
quand la mer retient tout.

samedi 8 août 2015


Bons baisers du convoi exceptionnel


en route
la balade des pigments 
en soute
des jambes en excédent 

vendredi 31 juillet 2015

mardi 28 juillet 2015


nous y voilà
dans le vortex estival 
la ville hémorragique  
la fadeur des tomates un débat
l'indolence générale on y va
le bain de mer, la méduse et le bras
seule la sieste hermétique
ses rêves hors agenda
balancent du réel à tout va

jeudi 23 juillet 2015


Rayon eau / Rayon femme

C’est fou
Toutes les eaux ont désormais des goûts
La plate et la gazeuse en leur temps sympathiques
Ont laissé place à la polyphonie aqueuse 
C'est sûr
La femme et la maîtresse en leur temps bien pratiques
auront à composer avec d'autres muqueuses.

mardi 21 juillet 2015


chaleur 
sangsue
il m'en cuit
te dire encore
fais cet effort
décolle-moi
au lieu de quoi
tu t'insinues
et insinues 
que l'effort 
est pire alors
on sue plus fort

mardi 14 juillet 2015


Le chant des sirènes

… et tous furent attirés par un drôle de chant : strident comme une alarme et traduit dans toutes les langues européennes. Et les sirènes portaient toutes un costume sombre, un costume d'homme pour la plupart, sauf une, car il y avait bien un spécimen féminin, et peut-être quelques montures de lunettes en écaille mais pas de cheveux longs. 

dimanche 12 juillet 2015


Cellule de crise à l'hémicyle

Il se murmure qu'El Chapo, le baron mexicain de la drogue, s'est évadé de prison avec une seule destination en tête :  filer vers Bruxelles. Pourrait-il racheter la dette grecque ? Le monde retient son souffle. 

samedi 11 juillet 2015


La scène & l'hémicycle 

Ils sont en pleine gesticulation. En pleine tirade, en plein acte, en plein dedans. Ils sont tous à Avignon, mais pas sur le pont du politique. Ils n'iront pas à Bruxelles, le souffleur me l'a dit. Pour une fois qu'il n'y a pas de débâcle intermittente, de grève des représentations, ils ne vont pas lâcher la rampe et ses feux. Show must go on
Ils doivent pourtant tout à la Grèce, à sa puissance mythologique, antique, tragique, dramaturgique. Des enfants gâtés. Tant Py pour eux. 

vendredi 10 juillet 2015


La mode & l'hémicycle

Les jeunes filles mannequins, réquisitionnées chaque début juillet pour la semaine de la Haute Couture parisienne auraient pu s'en tenir là, au dernier défilé du 9 juillet. Mais non, elles louent un bus. Elles montent dedans. Elles indiquent au chauffeur leur destination : direction Bruxelles. Le trajet n'est finalement pas beaucoup plus long qu'un embouteillage rue de Rivoli, à la seule différence que l'engin roule. Pénétrer l'hémicycle du parlement européen, pour elles, c'est comme découvrir un décor que Karl n'aurait pas eu l'audace de faire surgir au Grand Palais. Du vrai réel, aussi abstrait qu'une dette grecque. Elles parcourent les travées sans qu'on leur donne des ordres, elles sourient par défi envers tous les pouvoirs. Elles viennent d'un peu partout, et cet espace traversé par les langues et les nationalités est un peu leur maison. Elles vont rester là. Au moins jusqu'à dimanche. Elles vont faire en sorte que ce foyer ne brûle pas. 

jeudi 9 juillet 2015


Le cycle & l'hémicycle 

Depuis le Havre, étape du jour, les coureurs du Tour de France ont la ferme intention de ne pas rejoindre la Bretagne, mais de retourner en Belgique, a-t-on appris d'une source proche de la déraison. Direction Bruxelles, en peloton serré. Sur leur chemin, ils trouveront les gourdes et les idiots nécessaires au ravitaillement de la peur. Les coureurs refusent désormais le contre-la-montre. Les coureurs ne veulent plus avoir la tête dans le guidon. Les coureurs rejettent un maillot portant la même couleur que les étoiles de pays désunis. Ils débouleront en sueur dans un dernier sprint, leur effort éclaboussant des dirigeants horrifiés par la vue de mollets apparents et de muscles formés par le labeur. Pas de champagne à l'arrivée. 

mercredi 8 juillet 2015


L'arène & l'hémicycle

Les taureaux de Pampelune, traditionnellement lâchés dans les rues, ont décidé de continuer leur route pour rallier les étoiles de Bruxelles. 1177 kilomètres au pas de charge me confirme une source sûre de moi. J'ai le temps de peindre le drapeau européen en rouge pour motiver les bêtes dont l'arrivée est prévue pour dimanche. Les taureaux ne veulent plus piétiner les gens. Les taureaux ne sont pas prêts à mourir. Les taureaux veulent voir la frayeur des dirigeants. Lire sur leurs visages la peur bleue Europe.

dimanche 5 juillet 2015


Corps nus dans les appartements
apparemment
courants d'air suppliques au vent
possiblement
mais le ciel peut attendre
la Grèce choisit son camp.

jeudi 2 juillet 2015

mercredi 1 juillet 2015


Il faut boire, boire et reboire, et faire des rébus
(ceci n'est pas un message d'alerte en cas de vague de chaleur du Ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes - d'ailleurs le terme chaleur, plutôt que canicule, trop meurtrier, à qui s'adresse-t-il dans ce Ministère aux vocations plurielles et féminines... mais bref, ce n'est pas le débat, jouons plutôt un peu.)


Mon premier est bien brave
Ma seconde est bien aimée
Mon troisième est bien surpris
Mon quatrième n'est pas de l'eau
Mon cinquième est bien droit
Mon sixième est bien là


(preux-mie-hé!-jus-i-y-est)

Et ce rébus qui ne contient pas d'eau ne trouvera pas grâce aux yeux du Ministère...

mardi 30 juin 2015


Ces temps-ci

Briser la glace en parlant canicule ? 
Non merci.
Je préfère jeter un froid. 

dimanche 28 juin 2015


Le cul entre deux chaises

Un fauteuil en gosier
avale son Emmanuelle 
mais non c'est du rotin
éructe un érudit des brins

Un fauteuil en crottin
à cheval Emmanuelle
mais non c'est de l'osier
nous voilà bien 

vendredi 26 juin 2015


Objet non identifié

J'avance un peu
on me dit chaud
un deuxième pas
content de moi
on me dit froid
je gèle me brûle
et chercherai en vain
le four à pain de glace à l'eau

dimanche 21 juin 2015


Tomber des nues

Non mais quelle idée aussi de laver sa lingerie sale en public.
Visibles, mes hauts et mes bas.
Ma fatigue dans un élastique las. 
Mes rêves la peau pincée.
Le bonnet sur le coeur.
La corde à mon arc.
Baleines échouées.
Soutien désarmé.
Ce à quoi je m'attache, qui pour m'en détacher.

mercredi 17 juin 2015


Une scène

Un couple marche sur le boulevard, mais la femme opère chaque fois une sorte de décrochage, un pas de côté, comme si l'autre se mettait sciemment sur son chemin et qu'elle voulait à tout prix s'en débarrasser. Exaspération. Quelque chose ne va pas entre eux. Ils portent des sacs, un morceau de leur vie, l'errance, et lui tient en plus une cage en plastique à la porte grillagée, de celles qui contiennent supposément un animal de compagnie. Son pas à elle n'est pas très assuré, elle flotte plutôt, jambes maigres dans un jean étroit, pendant qu'il est à ses trousses, mais pas vraiment, il avance quoi, il fait ce qu'il peut avec son barda, elle s'agace, il la fixe, en orbite. C'est le moment de traverser, et à l'arrêt, c'est de pire en pire, il est trop proche dans l'immobilité, comme aimanté, elle se recule, se décale, il veut lui parler, elle ne veut pas, allume une cigarette pour se créer un espace à elle, dentition, bras, briquet, feu vert, et elle s'élance comme pour en finir avec lui, rage, dépit, mouvement, il balance la cage à bout de bras qui atterrit contre la portière d'un monospace qui circule, c'est son droit. Bruit du choc des deux caisses, celle du chat contre celle de l'homme, les gravillons d'une litière se répandent depuis l'ouverture et arrosent le bitume, les autres piétons sont saisis, le projectile aurait pu les atteindre, à qui était-il destiné, à cette femme soudain bolide qui a déjà rejoint l'autre côté du trottoir, bientôt évaporée pendant que le type ramasse la cage et crie "Je l'aime mais elle comprend pas" alors que les gens veulent surtout savoir s'il y a un animal là-dedans, mais rien, on n'entend pas un son provenant du bloc mystérieux. La voix de l'homme, elle, continue de retentir, propos décousus, les mots hôtel, plainte, les verbes dépouiller, tuer et puis le conducteur sort, et là c'est une autre histoire, une autre haine qui pourrait surgir, il contourne sa voiture, regarde la zone d'impact, étonnamment placide pourtant, ou alors il bouillonne, mais c'est comme si l'image de la petite maison de l'animal comme objet percutant était une chose trop saugrenue et seulement capable d'anesthésier sa colère, et puis pas d'enfoncement à signaler, il remonte à bord, alors que l'amoureux transi et furax est déjà parti à la recherche de son tourment.
Pendant ce temps-là, des élèves planchent sur un des sujets de l'épreuve de philo en série économique et sociale : "La conscience de l'individu n'est-elle que le reflet de la société à laquelle il appartient ?".

lundi 15 juin 2015


Tout comprendre de travers de porc
(et)
trop tirer sur la corde vocale
jouer avec le feu au lac
boire la coupe jusqu'à la libido
crier au loup y es-tu
être aux abois sans soif 
sauver sa peau de chagrin
souffrir le martyre au flanc
avoir une idée derrière la tête de lit


jeudi 11 juin 2015


Ode à l'œillet 

chat noir
et tout ligaturé
odeur de poudre 
air déchiqueté
attaches fortes
pourtant
je t'offre mon vase
prends en soin

mardi 9 juin 2015


Le risque de se mettre la tête à l'envers, 
c'est de la retrouver au mauvais endroit. 

vendredi 5 juin 2015


À froid

Les mots sont invités à ne pas tous se présenter au portillon labial, à rester dans la glacière au-delà d'un certain degré Celsius. En cas de forte chaleur, les phrases seront réduites à la Trinité sujet-verbe-complément. Ceci pour ne pas empâter la bouche, déjà en surchauffe quand la déshydratation guette. Merci.

samedi 30 mai 2015


Dans mon dressing 

Bouche : ourlet fait 
Sexe : bouton recousu 
Cœur : encore au pressing 
Pied : raccommodé 
Crâne : lavé, plié, rangé
Main : pièce vintage
Tripes : deuxième essayage
Yeux : nettoyage à sec
Seins : sans épaulettes

mardi 26 mai 2015


Surréaliste

Trois bonbonnes de gaz
Un panier de framboises
Deux films de Jacques Demy

Sept aiguilles de pin
Une action agit-prop
Cinq noms de maladies

Ribambelle de ronds-points
Et plus rien

lundi 25 mai 2015


Circulation 

du vent
du pollen
des idées
de l'air
des gens
des germes
du balai
de la rumeur
du sang 

lundi 18 mai 2015


Mer intérieure

Golfe du Lion 
sable crinière
je médite
Golfe de Porto
soleil corsé
terre cuite
Golfe de Gascogne
bataille rangée
on se frite
Golfe du Morbihan
le coupe-vent
prend la fuite
Golfe de Saint-Malo
et ses dimanches 
de granit. 

vendredi 15 mai 2015


Mourir de rire

J'ai voulu avaler un clown. Passer le chapeau au mixeur, faire un espuma de perruque, débiter le nez rouge à la mandoline, cuire à l'étouffée le costume en polyester, dresser l'assiette en l'agrémentant de la fleur en plastique. Petite sauce au fard gras. C'est au moment d'avaler les chaussures que les choses se sont gâtées. Pièce montée trop volumineuse. Rien ne passait. Tout sur l'estomac. Jusqu'au trépas. 

mercredi 13 mai 2015


Le bon tempo

"J'ai le passé qui m'présume
j'ai le futur qui m'pressure
et le présent qui m'presse-pure

J'ai l'instant qui m'donne des ordres
la mémoire qui m'désordonne
et l'oubli qui m'désarçonne"

ad lib. 

mercredi 6 mai 2015


(Quand la vie contemporaine fait écrire n'importe quoi)

Alors que j'étais tranquillement occupée à scanner le code-barres au dos de mon paquet de rouleaux de papier toilette à l'épaisseur conséquente pour vérifier si une grande enseigne afficherait un prix plus attractif que celui que j'avais eu à payer en m'en tenant au rack d'une moyenne surface, et tout ceci à l'aide de mon smartphone qui m'offrait ce service grâce à une application dédiée, le destin frappa soudain à ma porte. 

mardi 5 mai 2015

Une vie

J'ai fait 
l'ENA deux ans d'analyse
En passant par 
Sciences-Po des moments de crise
Je suis
trilingue agoraphobe
J'ai un 
Master problème d'ego
J'entame 
une formation longue thérapie
J'aspire
à faire carrière j'expire docteur

samedi 2 mai 2015

lundi 27 avril 2015


Déclamer toute la nuit des vers dans son sommeil.
Au matin, essuyer l'asticot de bave blanche qui a rejoint la joue.
N'est pas poète qui veut. 


dimanche 26 avril 2015


Conférence de presse 
(moments de vie, à la manière du procureur de la République de Paris)

"En décembre 2014, en pleine période des fêtes de Noël passées dans une maison de famille située dans le Périgord Noir et réunissant douze membres âgés de 6 mois à 70 ans, une huître n°3 jugée douteuse a fait l'objet d'une mise à l'écart pour éviter tout embarras post-réveillon. Le 2 janvier, deux individus, identifiés comme un couple depuis juin 2011, ont fait le chemin inverse vers leur domicile avec pour objectif la reprise du travail, et l'on note qu'un arrêt a été effectué à la station service de La Source. Le ticket de caisse confirme l'achat de confiseries, en plus d'un plein d'essence sans plomb. Toujours en janvier, le 20 du mois, l'acquisition d'une citadine 5 portes automatique avec équipement multimédia GPS à écran tactile et une technologie inédite visant à faciliter les créneaux a permis au dit couple d'étendre son parc automobile, pour, je cite "que la prochaine fois, tu te démerdes seule pour aller là-bas, je peux plus supporter les remarques de ton père". En février 2015, alors que la tension au sein de la structure conjugale était retombée et que l'homme et la femme célébraient la Saint-Valentin au restaurant Cru & Stacés, la consommation d'un plateau de fruits de mer leur a été fatale. L'intoxication alimentaire n'a malheureusement pas pu être évitée. Le couple n'a pas survécu."

vendredi 24 avril 2015


Des fronts maculent des vitres de bus
Dehors troublé derrière la couche
Le doigt passé sur la matière
Pour voir derrière 

mardi 21 avril 2015


Considérations météo

Les lunettes de soleil pour commencer. Et la crème solaire, qui est certainement plus qu'un indice. Tous ces filtres entre soi et le monde ne sont pas là seulement pour nous protéger du soleil. Simplement le beau temps appelle la balade, le pique-nique, le barbecue, le point d'eau. Soudain, après des mois d'isolement, l'extérieur s'impose, et la foule qui va avec, cohorte avide d'UV. Il faut alors pouvoir dissimuler son regard, qui se fixera où il veut plutôt que sur le visage de cet interlocuteur déjà couleur homard aimant faire partager très largement son point de vue sur le monde (où trouver les meilleures merguez dans le coin par exemple). Pour diminuer un peu plus la pression sociale, lever les yeux au ciel sans craindre d'être remarqué est un autre avantage. Le spray protection 30 protégera quant à lui de toute stratégie tactile ; le grain de peau à découvert quand les températures grimpent fonctionnant souvent comme un aimant. Prévenir la caresse d'un vague ami commun que le rosé aura désinhibé en lui signalant qu'il viendra s'échouer sur un corps gras, et le manège ne se reproduira pas. Parions enfin sur la pollution galopante qui rendra peut-être un jour le port du masque obligatoire. Il sera dès lors possible de profiter du ciel tout en neutralisant les paroles a et b ou b.a.-ba, dont la science établira bientôt le potentiel de dangerosité quand l'humain y est trop exposé.

dimanche 19 avril 2015


Partialisme : États généraux XIII 
Aujourd'hui : les bouches occupées




jeudi 16 avril 2015


Plein air de déroute

Le déjeuner sur l'herbe des pigeons parisiens
Le sandwich salarié à chacun son destin
La terrasse monoxyde touristes sans festin
La ville sous le soleil en son drôle d'intestin 

mardi 14 avril 2015


Des arbres à abattre

J'assiste par hasard au démontage d'un arbre en milieu urbain. Un élagueur perché débite des morceaux du tronc volumineux petit à petit. Un travail minutieux et risqué, des encordages complexes et le bruit de la tronçonneuse. Je ne pense pas plus au désagrément sonore qu'à la raison de cette destruction verte, je regarde surtout le gars qui ne travaille pas seul, qui ne peut même pas faire le tour de ce qu'il s'apprête à mettre à terre, j'observe toute cette logistique et cette maîtrise pour venir à bout d'un machin. Je remercie cette scène de s'être trouvée sur son chemin car elle m'amène à me souvenir du titre d'un texte de Thomas Bernhard : Des arbres à abattre ou le monologue furax d'un observateur de la société artistique viennoise. Le lire au plus vite, alors je presse le pas et quitte l'élagueur et sa sciure de bois.  

dimanche 12 avril 2015


Paris km zéro 

Il m'a fallu courir plus vite pour échapper aux visions de lycra.
Faire de longues foulées pour ne pas voir les visages empourprés par l'effort asphyxiant.
Filer fissa pour éviter les sueurs éparses, les humeurs volantes. 
Augmenter la cadence pour m'éloigner des râles et des hourras.
Mon marathon de feignasse.

samedi 11 avril 2015

Première mondiale


Alors que la réplique magistrale de la grotte ornée dite Chauvet vient d'être inaugurée, je déclare ouvert mon propre petit domaine, révélant tout d'une prouesse génétique au service de l'émotion. En avant-première, voici la partie gauche de mon patrimoine manuel, et son bouquet digital unique. Ma main qui pendouille quand je cours, qui devient moite quand je chasse, qui lève son majeur quand j'affronte. Je souhaite d'ores et déjà la bienvenue à ceux qui désireront me visiter et pourront saisir ainsi l'ampleur des dégâts. Mes organes se succèdent offrant à l'œil une diversité de formes et de matières, allant du plus lisse au plus tourmenté et témoignant de la courte et ennuyeuse histoire de mon humanité. Mon public se trouvera face à un ensemble d'une grande technicité, se montrant parfois de manière un peu (trop?) théâtrale. La visite se terminera sur la grande fresque des lions. Je ne vous dis que ça. Je suis en train de constituer le kit photos et de régler les derniers détails du programme interactif. À bientôt chers curieux.